Ce jeudi 30 octobre au matin, les députés du Burkina Faso devaient examiner et adopter le projet de loi portant révision de la Constitution permettant une nouvelle candidature du président Blaise Compaoré après 2015. En rappel, la modification de la constitution faisait l’objet d’une vive controverse entre l’opposition politique et la société civile d’un côté et la majorité présidentielle de l’autre.
A l’appel de l’opposition politique et de la société civile, en particulier des organisations de jeunesse, plusieurs centaines de milliers de Burkinabé se sont rassemblés sur la place de la révolution dès le matin du 30 octobre. Les manifestants après avoir affronté les forces de l’ordre, ont réussi à pénétrer dans l’enceinte du Parlement qu’ils ont incendié à l’instar de plusieurs édifices publics dont le ministère de l’administration territoriale et le bâtiment abritant les bureaux du Premier Ministre. Des affrontements ont eu lieu dans plusieurs villes du pays et se sont soldés par plusieurs morts et des destructions de biens publics et privés.
L’ex président, qui s’est exprimé en fin de soirée, a refusé de démissionner malgré les demandes pressantes de l’opposition et surtout de la rue. Il s’est déclaré en revanche ouvert à l’idée d’un gouvernement de transition et a promis de remettre le pouvoir au prochain président élu.
Cette situation ouvrait la porte à un vide qui laissait la place à l’incertitude quant à la gestion du pouvoir au Burkina Faso. Suite à la pression des manifestants, ce 31 octobre 2014, le Président Blaise Compaoré démissionne de ses fonctions de Chef d’Etat et le général Honoré Traoré, chef d’état-major de l’armée s’est autoproclamé chef de l’État du Burkina Faso.
Devant cette situation qui plonge le Burkina Faso dans une situation d’incertitude politique et dans une extrême fragilité sécuritaire et sociale, le Forum de la société civile d’Afrique de l’Ouest (FOSCAO) marque sa vive préoccupation et ses inquiétudes relatives d’une part, à la promotion et à la protection des droits de l’homme et d’autre part à la paix et à la sécurité de ce pays.
Le FOSCAO tient à manifester toute sa solidarité à la société civile du Burkina Faso et présente ses condoléances attristées à toutes les familles des victimes de ces récents évènements tragiques.
En vertu du protocole de la CEDEAO sur la gouvernance et la démocratie de 2001, qui stipule dans son article 1er que Tout changement anticonstitutionnel est interdit de même que tout mode non démocratique d’accession ou de maintien au pouvoir, le Forum de la société civile de l’Afrique de l’Ouest exprime sa consternation devant la persistance du phénomène des dévolutions non légales du pouvoir politique dans les pays africains. Par ailleurs, à travers sa plate-forme active au Burkina Faso, le FOSCAO note une véritable fragilisation des institutions républicaines qui, à l’ouverture de la transition, vont être remises en question, interrompant le processus d’approfondissement de la démocratie et de l’Etat de droit.
La mise en place d’une transition de 12 mois est nécessaire et la communauté internationale, de même que les médiateurs de la CEDEAO devraient s’atteler à renforcer le cadre de discussion entre l’armée et l’opposition en vue de mettre en place des organes de transition consensuels. La transition devrait être dotée d’un agenda clair permettant d’élaborer une constitution, une loi électorale, une charte des partis politiques et l’organisation d’élections générales justes libres et transparentes dans les douze mois que va durer la transition.
Le rôle de la communauté internationale, en particulier de la CEDEAO, est d’accompagner les autorités de la transition en vue de doter le Burkina Faso d’un nouveau cadre juridique et institutionnel plus conforme avec les valeurs de la démocratie libérale et le progrès social
Le FOSCAO, en vue de contribuer à l’avènement de la démocratie en Afrique de l’ouest, réitère son attachement aux valeurs démocratiques dans la gouvernance des Etats africains. A cet effet, le FOSCAO recommande :
Le Forum de la société civile de l’Afrique de l’Ouest fait donc les recommandations suivantes :
1. L’ouverture d’une mission d’assistance internationale conjointe par la CEDEAO, l’Union Africaine, les Nations Unies et l’Union Européenne. Cette mission va assister les autorités de transition dans la préparation d’un nouveau processus constitutionnel
2. La prise en compte de toutes les parties prenantes notamment la société civile et les partis d’opposition dans la conduite de la transition, aux niveaux politique et managériale
3. L’armée devrait rester distante de la direction politique du pays tout en assurant la stabilité et la sécurité du processus
4. La conduite de la transition devrait être confiée à des forces non partisanes en vue de doter le pays d’un nouvel environnement où les partis politiques se prépareraient à la compétition politique en novembre 2015.
Fait à Abuja le 31 octobre 2014
Pour le Bureau Exécutif Régional
La Présidente Mme Nathalie Koné-TRAORE